28 juin 2010

Rue des deux gares

(en musique)



La porte s'ouvre. Sous le poids de l'intrusion le plancher frissonne, s'éveille enfin déclarant les ans qu'il a portés. On sent dans ses gémissements la vie qui lui a passé sur le corps, les paysages historiques. L'appartement se dévoile, son âme vous saisit. Avancez... dans le couloir rouge aux fauteuils de velours exilés d'un théâtre, drapés d'ambre charnel... Place numéro 15. La lumière en crue sur le passant s'improvise diva, et apprête le soleil en partitions délicates. Le regard s'attarde, la licence ici a les faveurs de l'abondance. Chaque pièce introduit ses confessions, emporte loin là-haut, où se cachent les mémoires... Jusque dans les perspectives, les toiles d'araignées depuis longtemps dévastées ont emprisonné les empreintes des hôtes, tandis que des femmes accrochées aux murs fument en sépia, parmi les mots d'autres, l'amour qui s'interroge, et les violonistes. La tête dérive, le carmin murmure. Les livres gardent les moutons. Les archets en étalage. Au fond à droite... la chambre de coton, comme le jour gravite, satellite des pensées érotiques, sous les draps et les matelas superposés s'immiscent les rémanences des peaux vacillantes, les mains âpres éprises et les songes absurdes voyages au long cours... Solitude - bienvenue. La nuit passera sur les tapisseries et les illusions, le bois redira son discours, le café et les épices extrairont la peau briochée des bruissements de lin... enfin... les quatuors joueront dans le salon, rue des deux gares...




Sténopé entre deux gares par nikø



19 commentaires:

L......................................................uC a dit…

Quelle jolie version de ce qui devint une scie dans la bouche de Charlotte...
On aurait envie de passer dans ce couloir aux souvenirs... "Le carmin murmure" comme tu dis.
...
(Preumsss' ! aucun mérite pour l'insomniaque qui hante les murs du petit matin).

olga a dit…

j'aime, j'aime à redécouvrir ce texte de si bon matin...Et Chopin me semble plus amical accompagné de ton texte et de cette photographie.
Bravo pour ce nouveau billet des enfers. J'aimais l'endroit et j'aime comment tu l'as fait tiens. Personne ne résiste à Melle d'enfer(t).

"La tête dérive,le carmin murmure." mon achat de ce matin.

Anonyme a dit…

J'ai pensé à Gainsbourg même sans le son. Sans leçon à te donner pourtant. Musique amour velours.
Quel beau bordel !

Anonyme a dit…

Luc n'aime pas Charlotte, Olga n'aime pas Frédéric, Kouki aime Serge, et moi je vous aime tous, mais n'en abusez pas, chenapans que vous êtes ! je vous aime tous, mais ma chouchoute c'est l'infernale (forcément)
Mme de K

Anonyme a dit…

je me dis (après avoir appuyé sur le bouton "fire") que mon commentaire ne fait pas avancer la réflexion... mais bon ça fait du bien le matin d'être un peu neueneu (pardon)
Mme de K

isabelle C. a dit…

Il n'y aurait pas un léger parfum de thé Genmaïsha ?
C'est beau un lieu habité ...

D'Or Et De Laine a dit…

Ton écriture est un voyage, mademoiselle.
Je pourrais m'attarder sur les courbes virtuelles de ces mots gorgés de coeur pendant des éternités.

Anonyme a dit…

Les mots sont bien choisis, la leçon de classique d'un erotisme fou, oscillant entre pas de deux et exquise partita. L'image est belle, romantique, bien choisie. Tiens, pour une fois, j'aime.
L'incorrigible barbon. G.

Frédérique M a dit…

Je viendrais bien visiter cet appartement et m'attarder, ici ou là, damoiselle. Est-ce loin ?

aléna a dit…

Je suis perturbée par Chopin que j'aime en secret - il me court-circuite le texte, je reviens demain.
:)

EroDojo a dit…

En quel siècle sommes-nous ?
Erotisme du temps velours...

aléna a dit…

Me revoilà, l'intrusion est belle et douce et craquante - appartement au corps féminin et soyeux ? (et Chopin lui va bien, tantôt calme, tantôt fou)

Mademoiselle d'enfer(t) a dit…

@ l u c: Tu l'as arpenté ce couloir... Forcément ça murmure, dans l'ombre... ;) Sinon j'aime Charlotte, je te préviens!

@ Olga: Je crois que c'est le lieu qui s'est emparé de moi...! Chopin et la photo ont de la gueule, ils sont bien de cette dimension de la rue des deux gares... Merci (pour l'achat ;) )

@ Kouki: Gainsbourg m'a séduite alors que j'étais adolescente. Il est tellement là, je crois. Je n'y pense pas tous les jours, je n'ai pas de manque, mais il est là. Et sur la tapisserie de mon ancien appartement était gribouillé quelques phrases de Marilou: "lorsqu'en un songe absurde, Marilou se résorbe, etc..."
Alors mauvaise influence? Musique amour velours forcément. Un beau bordel, merci!

@ Madame de K: ahah! C'est moi la chouchoutteu! C'est moi la chouchoutteu!

@ Madame bis: Comme je suis ta chouchoutte tu peux faire ce que tu veux ici (même être neuneu)

@ Isabelle C.: Du Genmaicha? Oui, et de la bonne came en plus! ;) Ce lieu-ci l'est tout particulièrement (n'est-ce pas?)

@ Féelonia: Merci... Je tenterai toujours de faire honneur à ta gourmandise :)

@ G.: Tes mots aussi sont bien choisis ;) Ça me fait forcément plaisir que tu aimes...Toi qui n'aimes que moi et pas mes mots ;) Incorrigible, oui!

@ Frédérique M: Celui-ci est à Paris, mais j'en connais qui raconte de belles histoires et se trouve plus près (beaucoup plus) :)

@ aléna: Reviens demain :)

@ EroDojo: On est ici dans l'intemporalité - L'érotisme peut-il avoir des frontières? Seule a sa place celle qui préserve de la vulgarité (je n'aime que la crudité)

@ aléna: J'aime comme le temps n'a pas d'échelle chez toi, et ce demain a plus de saveur... :)
Je n'avais pas songé à cet appartement ainsi, mais tu as raison, il a quelque chose d'une femme qui se livre... (et Chopin, aaah, Chopin... enfin... tu sais, quoi!)

Depluloin a dit…

Comme Madame de K., si elle permet, je vais rester un p'neu neuneu. Première lecture, musique... ça fait beaucoup. Serait-ce qu'on ne soye plus habitués? Je reviendrai Mam'selle, et comment...

Depluloin a dit…

Eh bien me voici... (Les deux premières phrases peut-être qui me barrent un peu la route. Ensuite, c'est la magie de Mam'selle! Une merveille! (On ne compte plus les "emprunts" de Gainsbourg donc je ne les compte plus non plus!:)

Mademoiselle d'enfer(t) a dit…

@ Depluloin: vous êtes revenu bien vite! L'appel des enfer(t)s est-il irresistible? :)
c'est drôle que vous pensiez Gainsbourg, alors que ce texte etait écrit depuis deja un certain temps, patientant dans un tiroir que sa photo soit réalisée, et que seule un thé japonais partagé avec Olga, Isabelle C. et l u c a vu par le plus grand des hasards défiler du Chopin et se révéler ainsi la musique qui parlerait de la rue des deux gares... Peut-être n'ai-je jamais réalisé à quel point Gainsbourg s'était inscrit en moi lors de mon adolescence... C'est une bonne chose je crois :)

Depluloin a dit…

Mam'selle? Oui, ça n'attend pas voyons!

(Non, je parlais des emprunts de Gainsbourg à la musique classique mais c'était hors sujet en effet!)

Zaile a dit…

Il reste des places ? Un strapontin ? Que je puisse rester encore un peu ?

Mademoiselle d'enfer(t) a dit…

@ Depluloin: Monsieur, je m'embrouille... Donc oui, Gainsbourg a eu le génie de faire d'œuvres très belles des bases mélodiques de tubes immémoriaux. Et vous savez quoi? Peu de gens savent que c'est de musique classique qu'ils écoutent. Ça m'plait bien cette idée :)

@ Zaile: Il reste des places (certains abonnés se sont absentés), ce sont les meilleures... en outre on y sert du genmaicha ou du très bon café :)

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